☕️ Dans la peau d’un livreur Uber Eats
4,6 euros par heure si l’on s’attache au temps de disponibilité, 11,6 euros par heure si l’on s’attache au travail effectif.
Vincent Mongaillard, journaliste au Parisien, s’est glissé dans la peau d’un livreur Uber Eats pendant trois semaines, et sa conclusion est claire : difficile de gagner l’équivalent du Smic net (9,40 euros de l’heure) dans cette profession qui réunit tout de même 65 000 personnes au statut d’autoentrepreneur. Entre 2021 et 2024, les revenus horaires bruts auraient chuté de plus de 34 % chez Uber Eats, en comptant l’inflation.
Chaque jour ou presque, il se voit demander de présenter sa carte d’identité ou d’enregistrer un selfie, une manière pour l’opérateur de lutter contre l’usurpation ou la sous-location de compte. Devant la chute de revenus, pourtant, la population des livreurs a nettement évolué : un récent rapport de l’Anses relevait que les travailleurs sans-papiers y étaient désormais surreprésentés.

Quant aux commandes, elles varient en termes de distance – l’expérience fera refuser au journaliste une épopée de Saint-Michel, au cœur de Paris, jusqu’à Nanterre au nord-ouest –, de contenus – dont ce lot de sacs poubelles demandés dans le XVIe un premier mai –, comme de temps d’attente.
Parmi les points de frustration les plus remontés par les livreurs, et expérimentés par le journaliste : le renversement des boissons, qui viennent inonder plus d’une fois les commandes.
Malgré l’aspect aléatoire des réceptions de commande, qui provoquent parfois le sentiment d’être utile, à d’autres moments, celui d’être persona non grata, « le plus dur, quand on est livreur, c’est de savoir s’arrêter », écrit le journaliste.
De la même manière qu’Uber a utilisé des techniques issues des jeux vidéos pour pousser ses chauffeurs à conduire plus, on sent le livreur tenté de faire toujours une livraison supplémentaire, dans l’espoir d’augmenter ses gains.
Du côté de la clientèle, explique le sociologue Fabien Lemozy, la facilité d’usage des applications de livraison a un autre effet secondaire : celui de créer des « rapports de domesticité » avec les travailleurs précaires.
Auteur : Mathilde Saliou
Aller à la source