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Ce que le Soleil a infligé à la Terre il y a 14 000 ans… pourrait nous ramener à l’âge de pierre !

Ce que le Soleil a infligé à la Terre il y a 14 000 ans… pourrait nous ramener à l’âge de pierre !

Les chercheurs peuvent remonter le temps en utilisant des archives sur Terre témoignant de l’activité solaire. Ils ont repoussé aujourd’hui les limites de notre connaissance en s’aventurant à l’époque de la dernière glaciation en Europe, ce qui leur a permis de découvrir les traces d’une éjection de masse coronale spectaculaire, 500 fois plus intense que celle connue en 2005 qui était déjà un record.

Depuis quelques décennies, les images de l’activité du Soleil sont de plus en plus spectaculaires et aussi bien les éjections de masse que les boucles coronales de notre étoile sont scrutées à diverses longueurs d’onde. Les images les plus intéressantes sont celles fournies par la mission SDO (Solar Dynamics ObservatorySolar Dynamics Observatory). Elles illustrent fréquemment des alertes concernant des tempêtestempêtes solaires en prélude à leur arrivée sur Terre sous forme de rayons cosmiques (essentiellement de noyaux d’hydrogène et d’héliumhélium avec des électronsélectrons), où elles causent des aurores boréalesaurores boréales et perturbent les champs magnétiqueschamps magnétiques de la magnétosphèremagnétosphère terrestre.

Comme on l’a vu pendant l’année 2024, ces tempêtes sont parfois si violentes que les aurores boréales deviennent visibles à des latitudeslatitudes aussi basses que celles de la France. Depuis plus d’une décennie aussi, on commence à avoir des indications qu’il s’est parfois produit dans l’histoire récente de la noosphère, au cours des quelques millénaires passés, des éruptions solaireséruptions solaires bien plus intenses, de sorte que des Homo sapiensHomo sapiens ont parfois contemplé des aurores boréales des centaines de fois plus brillantes que celles de 2024.


En février 2020, l’observatoire de dynamique solaire de la Nasa (SDO) a gardé un œil constant sur le Soleil, étudiant la manière dont le Soleil crée l’activité solaire et détermine la météo spatiale (les conditions dynamiques dans l’espace qui ont un impact sur l’ensemble du Système solaire, y compris la Terre). Depuis son lancement le 11 février 2010, SDO a collecté des millions d’images scientifiques de notre étoile la plus proche, offrant aux scientifiques de nouvelles perspectives sur son fonctionnement. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l’écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa’s Goddard Space Flight Center

Les événements de Miyake, des tempêtes solaires extrêmes

Selon les travaux d’une équipe internationale de scientifiques, publiés dans un article de Earth and Planetary Science Letters, au cours de l’an 12 350 av. J.-C., une tempête solaire que l’on peut considérer comme la plus puissante connue à ce jour a frappé la Terre. On était alors à la fin de la glaciation de Würm, du nom donné à la dernière période glaciairepériode glaciaire du PléistocènePléistocène dans les Alpes qui s’étendait en gros de 115 000 à 11 700 ans avant le présent.

On doit notamment cette découverte à la chercheuse postdoctorale Kseniia Golubenko et au professeur Ilya Usoskin de l’Université d’Oulu, en Finlande. Elle est basée sur la détection des abondances du fameux isotopeisotope de carbonecarbone 14 dans des cernes d’arbresarbres anciens. Abondances qui ont été interprétées grâce à leur nouveau modèle chimiechimieclimatclimat, appelé SOCOL:14C-Ex, spécialement conçu pour reconstituer les tempêtes de particules solaires dans des conditions climatiques glaciaires anciennes, comme l’explique un communiqué de l’Université d’Oulu.

Il s’agissait typiquement de ce que l’on appelle aujourd’hui un événement de Miyake, une des tempêtes solaires extrêmes (extreme solar events ou ESE en anglais), dont l’existence a été démontrée la première fois en 2012 par la géophysicienne et spécialiste des rayons cosmiques japonaise Fusa Miyake pendant sa thèse de doctorat. L’étude menée à l’époque et publiée dans Nature avait révélé une forte augmentation de carbone 14 dans les cernes annuellesannuelles de cèdres du Japon pour les années 774-775.

Un événement de Miyake se signale par un pic d’isotopes de carbone 14 radioactifs dans les cernes de croissance des arbres, ainsi que par des pics du bérylliumbéryllium 10 et du chlorechlore 36 dans les carottes de glacecarottes de glace, datés indépendamment. Ces pics sont dus à l’arrivée des rayons cosmiques du Soleil avec une intensité anormalement élevée, provoquant des réactions nucléairesréactions nucléaires – comme l’explique la vidéo ci-dessous. Les organismes vivants se chargent alors plus que d’ordinaire en carbone 14 dans une atmosphèreatmosphère qui en a été temporairement enrichie plus que d’habitude. Les événements de Miyake ne se produisent pas périodiquement, mais d’après les données disponibles, ils semblent séparés par des intervalles de 400 à 2 400 ans.


La datation par le carbone 14 permet d’estimer l’âge de vestiges archéologiques, peintures rupestres, sédiments… Son principe : utiliser les propriétés de décroissance radioactive de l’isotope carbone 14, atome présent dans toute matière organique et dans les carbonates. Cette technique est utilisée pour dater des objets de quelques centaines d’années à 50 000 ans environ. © CEA

Le carbone 14 et la dendrochronologie

Les travaux des chercheurs finlandais reposent sur la dendrochronologie (du grec dendron = arbre, chronos = temps et logos = étude) qui consiste à analyser des cernes annuels de croissance d’arbres pour obtenir des datations. On peut utiliser en complément les taux d’isotope 14 de chaque cerne individuel d’arbres à partir d’échantillons de boisbois anciens, notamment des échantillons d’arbres morts enterrés dans les berges des rivières et des bois excavés lors de fouilles archéologiques. Toutefois, les éruptions solaires ne sont pas les seuls événements cosmiques capables de fabriquer du carbone 14 dans l’atmosphère, et pour vraiment identifier une tempête solaire, il faut aussi mesurer un autre isotope, le béryllium-10, enfermé dans des carottes de glace prélevées dans des glaciersglaciers et des calottes glaciairescalottes glaciaires.

Le saviez-vous ?

Depuis les travaux des pionniers de la physique nucléaire qu’étaient Ernest Rutherford et Pierre et Marie Curie, les expériences montrent que ni la température, ni la pression, ni des champs magnétiques ne font changer de façon mesurable les taux de désintégration de noyaux. C’est pourquoi il est possible de dater différents objets archéologiques et géologiques en y mesurant la quantité d’un isotope radioactif connaissant celle présente à l’origine.

Le plus connu d’entre eux est le carbone 14, dont la période radioactive est d’environ 5 730 ans. Ainsi, moins il reste de carbone 14 dans le corps momifié d’un pharaon égyptien, plus la date de son décès est ancienne. Si cette période n’était pas constante, le temps mis par les noyaux d’un échantillon de carbone 14 pour diminuer de moitié en nombre (ce qui est la définition de sa période) ne serait pas le même selon l’ancienneté de la constitution de cet échantillon. Cela rendrait incertaines et floues les datations en archéologie.

En effet, la constance dans le temps des taux de désintégration du carbone 14 est au fondement de la méthode de datation développée par Willard Libby en 1949. Elle lui vaudra le prix Nobel de physique en 1960. Toutefois, selon un autre prix Nobel, Emilio Segrè, elle lui aurait été suggérée par Enrico Fermi à l’occasion d’un séminaire à l’Université de Chicago.

On sait depuis bien longtemps que le taux de carbone 14 dans l’atmosphère de la Terre varie de façon cyclique en fonction de l’activité du Soleil. Le phénomène est facilement compréhensible car notre étoile produit un flux intense de protons fonçant vers notre Planète, constituant une part importante des rayons cosmiques frappant la Terre. Ces rayons génèrent indirectement un flux de neutrons qui entrent en collision avec les noyaux d’azote de la haute atmosphère, lesquels se transforment alors en cet isotope radioactif du carbone. La magnétosphère de la Terre stoppe une partie des rayons cosmiques et comme elle peut elle-même varier dans le temps, elle influe sur le taux de rayons cosmiques atteignant l’atmosphère.

On sait donc que la méthode de datation développée par Willard Libby en 1949 souffre d’une imprécision liée à la quantité moyenne de carbone 14 dans l’atmosphère produite par les rayons cosmiques. Mais, on sait tenir compte des cycles du Soleil et même des variations du champ magnétique de la Terre, pour obtenir de bonnes datations.

« Comparé au plus grand événement de l’ère des satellites modernes – la tempête de particules de 2005 -, l’événement ancien de 12350 av. J.-C. était plus de 500 fois plus intense, selon nos estimations », explique Golubenko toujours dans le communiqué de l’Université d’Oulu.

S’il devait se produire de nos jours, il aurait des conséquences catastrophiques car il y aurait en effet des flux de particules solaires, comme ceux des électrons tueurs, qui causeraient potentiellement des dommages massifs aux satellites de télécommunication, par exemple ceux de Starlink.

Auteur : Laurent Sacco, Journaliste

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Artia13

Bonjour ! Je m'appelle Cédric, auteur et éditeur basé à Arles. J'écris et publie des ouvrages sur la désinformation, la sécurité numérique et les enjeux sociétaux, mais aussi des romans d'aventure qui invitent à l'évasion et à la réflexion. Mon objectif : informer, captiver et éveiller les consciences à travers mes écrits.