Critique The Fountain of Youth : il vaut quoi le Indiana Jones de Guy Ritchie ?
Apple Studios y regarde à deux fois désormais. Après les échecs successifs de Killers of the Flower Moon, Napoléon et surtout Argylle, l’entreprise est plus frileuse quand il s’agit de proposer ses longs-métrages dans les salles obscures. En 2025, seul F1 par Joseph Kosinski et avec Brad Pitt aura le privilège du grand écran. Pourtant, sur le papier, le nouveau film de Guy Ritchie se serait trouvé une place de choix dans les cinémas du monde. La firme à la pomme a-t-elle été refroidie par la déchéance du Professeur Jones ? La perspective de remplir le catalogue de l’entreprise est-elle plus importante qu’un succès commercial ? Le film est-il tout simplement assez bon ? Fountain of Youth arrive ce 23 mai sur Apple TV+ avait la ferme intention de nous rappeler aux belles heures du cinéma d’aventure. Et c’est presque réussi.
Ça parle de quoi ?
Luke et Charlotte sont les enfants d’un célèbre archéologue. Ils se sont perdus de vue, mais sont réunis lorsque Luke sollicite l’aide de sa sœur pour trouver un artefact légendaire. Avec son équipe, et le soutien financier d’un millionnaire atteint d’un cancer, celui qui partage la même passion que son paternel pour les reliques historiques se lance à la poursuite de la fontaine de Jouvence. Mais leur quête va être largement compliquée par l’arrivée d’une mystérieuse organisation qui ne voit pas leur projet d’un très bon œil.

Pas le coup de fouet espéré
Qu’on se le dise tout de suite, Fountain of Youth ne souffre pas la comparaison avec la trilogie de Steven Spielberg (remarquez comme on évite de mentionner le quatrième film). Si l’envie semble être la même — une quête épique aux quatre coins du monde — le film de Guy Ritchie entend dépoussiérer les ressorts de ce genre de production pour s’inscrire dans un contexte contemporain. Pas de nazis à affronter, pas de fouet ou de Fédora, mais des technologies de pointe et un budget illimité pour étudier des lieux chargés d’Histoire. La présence de Guy Ritchie derrière la caméra promettait une bonne dose d’action, de courses poursuites ou d’affrontement musclés autant qu’une galerie de personnages colorés et captivants. Ça, ce serait dans un monde parfait…

Dès l’introduction, le film de Guy Ritchie peine à s’extirper de son modèle et coche toutes les cases du divertissement de circonstance. Il est d’ailleurs difficile de ne pas voir en Luke Purdue, campé par John Krasinski, un Indiana Jones en sous-régime. L’acteur a fait des films d’action son fond de commerce et peine à réinventer la figure du héros impertinent et rieur. Même son de cloche pour Natalie Portman, qui se retrouve enfermée dans une partition qui manque cruellement de relief, entre la sœur, la mère et le poisson hors de l’eau. Le personnage n’a rien à faire là et le récit rabâche constamment sa réticence à prendre part à cette aventure. Nous aussi, on préférait être ailleurs, devant La Dernière Croisade… au hasard.
Avez-vous vu déjà vu ?
Même leur adversaire, campée par Eiza Gonzalez, ne convainc pas en menace qui plane sur l’équipe et leur mission. Comme ses comparses, elle pâtit d’une écriture qui tend beaucoup trop à la paraphrase des monuments du cinéma d’aventure. Une baston aux allures de préliminaires, un mentor mystérieux qui répète d’un ton grave que les Hommes ne sont pas prêts à découvrir la vie éternelle…
Prenez toutes les scènes emblématiques des Indiana Jones, La Momie ou À la Poursuite du Diamant Vert et vous avez un canevas que Fountain of Youth s’applique à reproduire avec moins de talent que ses aînés. C’est particulièrement vrai à l’approche du grand final, que l’on a l’impression d’avoir vu des dizaines de fois au cours des dernières décennies.

Toute magie a un prix, on vous laissera deviner lequel. De son côté, Fountain of Youth paie cher son manque d’originalité autant que sa portée émotionnelle réduite à peau de chagrin. Sans en dire trop, le film s’attarde à bâtir une sous-intrigue autour d’un héritage familial sans jamais lui donner l’occasion de prendre véritablement forme. Reste donc un arc narratif tout à fait dispensable, lui-même inscrit dans une intrigue en pilote automatique. On passera rapidement sur la musique originale, composante essentielle de l’iconisation d’un personnage comme Indiana Jones, qui là aussi n’a rien de légendaire. Chris Benstead, collaborateur récurrent de Guy Ritchie, ne livre aucune partition mémorable. Le film se contentera d’assener des compositions banales, à fond pour être certain que vous ne les manquiez pas. The Gentleman restera son dernier éclat, celui de Guy Ritchie aussi…
Heureusement, tout n’est pas jeté
Mais, fort heureusement pour le film d’Apple TV+, il n’a pas que son histoire pour convaincre son audience. L’action d’abord, n’a pas à rougir face aux récentes propositions du genre. Les combats sont assez nerveux et mis en valeur par la mise en scène de Ritchie pour nous divertir entre deux étapes de ce jeu de piste éculé. Le film n’est d’ailleurs pas avare en décors et séquences du genre, offrant à Fountain of Youth juste assez pour revigorer nos âmes de cinéphiles en manque de divertissement ambitieux. Avec un combat dans une bibliothèque, l’exploration d’une épave remontée à la surface et une course poursuite en Thaïlande, on en a un pour notre argent (bon, on n’en a pas dépensé, mais quand même).
Après deux heures qui nous ont laissés de marbre, on ressort surtout avec l’envie de retrouver le professeur Jones et la certitude que l’aventure n’est pas à la portée de tous. Fountain of Youth est une nouvelle preuve du génie Spielberg, qui a sacré Harrison Ford monument de la culture populaire et qui s’est lui-même élevé au rang de metteur en scène souvent imité… mais jamais égalé.
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Auteur : Julie Hay
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