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Donald Trump et Elon Musk mettent fin à leur idylle en direct sur les réseaux sociaux


La matière est-elle louable ?

Donald Trump et Elon Musk mettent fin à leur idylle en direct sur les réseaux sociaux

Donald Trump et Elon Musk se sont pris à parti jeudi soir, chacun sur son réseau social, dans une escalade de messages particulièrement virulents. Entre le président des États-Unis et l’ex-pilote du DOGE, la rupture est-elle consommée ? L’heure semble désormais à quelques règlements de comptes.

En quelques heures, les échanges ont viré du vaudeville – sarcastique, mais léger – à la tragédie grecque. Donald Trump et Elon Musk se sont littéralement écharpés jeudi soir par réseaux sociaux interposés. Le premier est allé jusqu’à menacer de couper tous les budgets publics attribués à SpaceX. Le second a affirmé que si les dossiers de l’affaire Epstein n’avaient pas été rendus publics, c’est parce que le nom de Donald Trump y figurait. Drame en trois actes.

Acte 1 : Elon Musk quitte le Doge

Déjà longuement documenté, le virage politique d’Elon Musk et son ralliement à Donald Trump ont conduit le patron de Tesla, SpaceX ou xAI à la tête d’un nouveau ministère, le département de l’efficacité gouvernementale, autrement surnommé Doge. Or, Elon Musk vient de quitter la tête de ce dernier. Officiellement, parce que sa mission prenait fin le 28 mai dernier. Officieusement, parce que les actionnaires de ses entreprises réclamaient son retour aux affaires, particulièrement chez Tesla, dont les ventes accusent des baisses marquées sur ses principaux marchés, même si Donald Trump s’est un jour changé en VRP de la marque, allant jusqu’à donner à la Maison-Blanche des airs de concession automobile éphémère.

Aux commandes d’un Doge doté d’un accès direct à tous les systèmes les plus importants du pays, Elon Musk aurait-il connu l’ivresse du pouvoir… et son corollaire en cas d’abus, la gueule de bois ?

Acte 2 : (Kill) the Big Beautiful Bill

L’homme d’affaires avait déjà exprimé à demi-mots ses réserves quant à la guerre commerciale lancée par Donald Trump à grands renforts de droits de douane, mais la solidarité (ou l’allégeance) l’avaient empêché de courir à l’incident diplomatique.

La donne était légèrement différente cette semaine, alors que le Sénat américain étudie la loi budgétaire élaborée par le gouvernement Trump. Baptisée « Big Beautiful Bill » (la belle et grande loi), elle endosse les principales promesses de campagne du président. Son adoption avant le 4 juillet (anniversaire de l’indépendance des États-Unis) est considérée comme un enjeu symbolique majeur.

Les ramifications du projet de loi sont innombrables, mais sa philosophie générale repose sur deux axes budgétaires principaux : une réforme fiscale sans précédent et un recours accentué à la dette, qui pourrait ajouter quelque 3 800 milliards de dollars au déjà très lourd déficit sur les dix prochaines années. Le chiffre, qui émane des analyses menées par le Bureau du budget du Congrès américain, serait partiellement compensé par les gains de production découlant de la guerre commerciale lancée par Trump. Il fait tout de même redouter, à certaines figures du monde financier, la création d’une véritable bombe à retardement, si la dette américaine venait à perdre la confiance des marchés.

Les digues d’Elon Musk se sont fissurées mardi 3 juin, au sujet de cette Big Beautiful Bill.«  Je suis désolé, mais je ne peux plus le supporter. Ce projet de loi de dépenses du Congrès, massif, scandaleux et bourré de dépenses inutiles, est une abomination dégoûtante. Honte à ceux qui ont voté pour : vous savez que vous avez eu tort. Vous le savez », a lâché l’homme d’affaires sur X. Bien qu’il soit habituellement prompt à répondre aux provocations, Trump n’a pas immédiatement réagi.

Acte 3 : Interstellar

La mèche était déjà courte. Sa combustion s’est accélérée jeudi. Donald Trump, qui recevait le chancelier allemand Friedrich Merz, s’est finalement exprimé au sujet de son ancien envoyé spécial à la tête du Doge. « Elon et moi avions de très bonnes relations. Je ne sais pas si c’est encore le cas », a notamment déclaré le président. « Vous savez, Elon est énervé parce que nous avons enlevé l’obligation de rouler électrique », a-t-il également glissé. Le budget en cours d’examen prévoit en effet la fin des crédits d’impôts à l’achat de voitures électriques.

Est-ce cette sortie médiatique qui a provoqué le déclic ? Une chose est sûre : Elon Musk a dégoupillé jeudi soir. « Sans moi, Trump aurait perdu les élections, les démocrates contrôleraient la Chambre et les républicains seraient à 51 - 49 au Sénat », écrit-il en réponse à un extrait vidéo de la séquence précédente.

« Elon commençait à être à bout de forces, je lui ai demandé de partir et j’ai supprimé son mandat qui forçait tout le monde à acheter des voitures électriques dont personne ne voulait (ce qu’il savait depuis des mois que j’allais faire !) et il est juste devenu FOU », riposte très rapidement Donald Trump sur son réseau Truth.social. Avant d’embrayer :

« La façon la plus simple d’économiser de l’argent dans notre budget, des milliards et des milliards de dollars, est d’arrêter les subventions et les contrats gouvernementaux d’Elon. J’ai toujours été étonné que Biden ne l’ait pas fait ! »

« Il est temps de lâcher la vraie bombe : @realDonaldtrump est dans les fichiers Epstein. C’est la vraie raison pour laquelle ils n’ont pas été rendus publics. Bonne journée, DJT ! », rétorque Elon Musk quelques minutes plus tard, en référence à Jeffrey Epstein, condamné pour avoir entretenu un réseau d’exploitation sexuelle de mineures, dont le scandale a éclaboussé plusieurs personnalités publiques.

Dans la foulée, Musk lance un sondage : « Est-il temps de créer un nouveau parti politique qui représente réellement les 80 % du centre en Amérique ? ». Douze heures plus tard, les 4,3 millions de votes exprimés optent à 81 % pour le Oui.

Épinglé en Une du profil X d’Elon Musk, un sondage appelle à la création d’un nouveau parti

Le patron de SpaceX brandit enfin la menace de décommissionner la navette Dragon, chargée de pallier les insuffisances de Boeing en ramenant les astronautes hébergés au sein de la Station spatiale internationale.

Et maintenant ?

Quelques heures plus tard, Musk souffle encore un peu sur les braises en retweetant des mèmes illustrant cette guerre d’égos, mais le gros de l’incendie semble être passé. « Vous n’avez pas tort », répond-il à l’entrepreneur Bill Ackman, qui appelle à ce que les deux hommes fassent la paix au nom du bien commun.

D’après Politico, la Maison-Blanche s’affairerait déjà à rabibocher les deux parties, avec un échange téléphonique prévu dans les prochaines heures. Reste à savoir si cette prise de bec aura des conséquences durables soit sur la politique américaine, soit sur les entreprises et activités liées à Elon Musk. Ou si elle subsistera dans les mémoires, comme l’une de ces échauffourées médiatiques que goûte tant la téléréalité chère à Donald Trump.

Auteur : Alexandre Laurent

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Artia13

Bonjour ! Je m'appelle Cédric, auteur et éditeur basé à Arles. J'écris et publie des ouvrages sur la désinformation, la sécurité numérique et les enjeux sociétaux, mais aussi des romans d'aventure qui invitent à l'évasion et à la réflexion. Mon objectif : informer, captiver et éveiller les consciences à travers mes écrits.

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