Les humains pourraient-ils un jour voyager vers les étoiles lointaines ? Une réponse surprenante pourrait venir de petits mammifères souvent ignorés : les spermophiles rayés. Ces petits écureuils terrestres qui hibernent détiennent peut-être la clé d’une technologie révolutionnaire pour les voyages spatiaux. Leur capacité à réduire leur métabolisme de 95 % et à survivre sans nourriture ni eau pendant des mois fait en effet l’objet de recherches scientifiques passionnantes. Ces mécanismes biologiques pourraient un jour être utilisés pour résoudre les défis des missions spatiales de longue durée.
L’hibernation : un état au bord de la mort
L’hibernation n’est pas un simple sommeil prolongé. C’est un état métabolique extrêmement réduit où les fonctions corporelles ralentissent à l’extrême. La température corporelle des spermophiles rayés, par exemple, chute en dessous de 4°C, leur rythme cardiaque et leur respiration deviennent quasiment imperceptibles. Ce phénomène est si profond que l’activité cérébrale se réduit à un minimum, à tel point que les ondes neuronales mesurées ressemblent à celles observées chez des animaux en coma profond.
Pourtant, malgré cette apparente suspension de la vie, les animaux en hibernation ne sont pas figés. Ils connaissent de brèves périodes d’éveil durant lesquelles leur température corporelle et leur activité métabolique remontent, avant de retomber dans une torpeur profonde. Ces réactivations de courte durée, appelées « éveils inter-périodes », semblent être essentielles pour maintenir la santé des organes et préparer le corps à sortir de cet état extrême de manière fonctionnelle.
Une clé pour les voyages spatiaux ?
Les scientifiques voient dans ce phénomène un potentiel majeur pour les voyages spatiaux de longue durée, où les ressources comme l’eau et la nourriture sont limitées, et où la santé des astronautes pourrait être mise à mal par l’absence de gravité. En simulant un état d’hibernation, les astronautes pourraient réduire leur consommation de ressources pendant les longs trajets, ce qui permettrait d’alléger le poids des vaisseaux spatiaux et de prolonger les missions sans avoir à transporter des quantités massives de nourriture et d’eau.
Les recherches menées au laboratoire d’Elena Gracheva, à Yale, ont permis de découvrir des aspects fascinants de l’hibernation des écureuils rayés. L’une de ses études récentes a montré que ces animaux peuvent réduire leur métabolisme d’une manière qui semble protégée des dommages des radicaux libres, les molécules instables qui endommagent les cellules. Ces radicaux libres sont un des principaux facteurs du vieillissement et des maladies, notamment le cancer, et leur réduction pourrait être cruciale dans le cadre des voyages interstellaires où la durée des missions nécessiterait de préserver les astronautes sur plusieurs années.
Protéger contre les radiations
Mais les bénéfices de cette recherche ne se limitent pas seulement à la gestion des ressources. Un des défis majeurs de l’exploration spatiale est l’exposition aux radiations cosmiques, qui sont particulièrement dangereuses au-delà de la ceinture de Van Allen. Ces radiations peuvent entraîner des mutations génétiques et des cancers. Or, des études ont montré que les spermophiles rayés semblent résister mieux aux effets des radiations grâce à leur métabolisme ralenti.
Une étude menée par Kelly Drew, chercheuse en biologie à l’Université d’Alaska, a montré que des animaux en état d’hibernation subissent moins de dommages à leur ADN, grâce à une activité cellulaire réduite. Concrètement, le ralentissement du métabolisme entraîne une réduction de la régénération cellulaire, ce qui protège les cellules contre les mutations causées par les radiations. Cette découverte pourrait offrir de nouvelles solutions pour protéger les astronautes contre ces radiations mortelles. Cela pourrait potentiellement être transposé à la médecine spatiale, en développant des traitements visant à préserver l’ADN des astronautes pendant leurs voyages lointains.

Une avancée pour la médecine et la physiologie humaine
Les applications de l’hibernation ne s’arrêtent pas à l’espace. Les découvertes faites avec les spermophiles rayés pourraient avoir des conséquences majeures pour la médecine. Le ralentissement du métabolisme, un des piliers de l’hibernation, offre une protection contre divers types de stress, notamment les traumatismes crâniens, les AVC, et même les arrêts cardiaques. En diminuant la vitesse de fonctionnement du corps, on pourrait permettre aux organes de « se réparer » plus lentement et ainsi éviter les dégâts irréversibles causés par le stress.
Les recherches menées sur des souris et des porcs ont aussi montré que l’induction d’un état d’hibernation chez ces animaux pourrait améliorer la récupération après un traumatisme ou une chirurgie. Ce type de stase contrôlée permettrait d’augmenter les chances de survie des patients dans des situations médicales extrêmes.
En somme, ce petit écureuil terrestre, dont l’hibernation est à la fois un mécanisme de survie et un prodige scientifique, pourrait bien jouer un rôle central dans l’avenir de l’humanité. Que ce soit pour explorer l’espace ou pour faire progresser les traitements médicaux, il est possible que la clé de notre futur se trouve dans les mécanismes biologiques des spermophiles rayés. Grâce à ces recherches, un futur dans lequel l’humanité s’aventure vers Mars, ou au-delà, pourrait ne plus être une simple fiction.