Frais de gestion : l’Europe envisage de taxer les milliards de petits colis venus de Chine
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Soutenue par la France, l’idée d’une taxation spécifique aux milliards de petits colis qui arrivent chaque année sur le Vieux continent fait son chemin à Bruxelles. La Commission européenne prépare la mise en place d’un droit de douane spécifique, qui se monterait à 2 euros pour les colis envoyés directement au client final, et 0,5 euro pour les paquets acheminés vers des plateformes de stockage intermédiaires.
Officiellement, il ne s’agirait pas de droits de douane tels que les envisage Donald Trump dans sa guerre commerciale avec le reste du monde, mais de « frais de gestion » (handling fees). La Commission européenne se prépare tout de même à étudier la mise en œuvre d’une taxation spécifique à tous les petits colis venus d’Asie, qui échappent aujourd’hui aux droits de douane traditionnels.
C’est ce qu’a confirmé mardi le commissaire européen au Commerce, Maroš Šefčovič, lors d’une audition au Parlement européen. Il a dans le même temps révélé les montants envisagés, qui seraient donc de 2 euros pour un colis en circulation libre (adressé à un client final) et de 0,5 euro pour un paquet acheminé en direction d’un lieu de distribution intermédiaire (entrepôt ou plateforme logistique) afin d’y être stocké avant sa mise en vente.
4,6 milliards de colis par an
Dans une communication dédiée, datée du 5 février dernier, la Commission européenne évaluait à 4,6 milliards le nombre de colis d’une valeur déclarée inférieure à 150 euros entrés sur le sol européen, majoritairement depuis la Chine.
« C’est deux fois plus qu’en 2023 et trois fois plus qu’en 2022, et nombre de ces produits se sont révélés non conformes à la législation européenne. Cette croissance exponentielle suscite de nombreuses inquiétudes », soulignait alors la Commission, expliquant qu’il était impossible, sur de tels volumes, de contrôler la conformité des produits importés.
D’où cette idée d’une taxation spécifique, dont le produit serait utilisé pour outiller et renforcer les services de douane des différents états-membres afin, notamment, de lutter plus efficacement contre les produits dangereux ou contrefaits.
Qu’elle soit collectée par les douanes ou acquittée par les plateformes, la taxe serait probablement répercutée sur le consommateur européen et c’est pour répondre à cette inquiétude que Maroš Šefčovič a précisé mardi les modalités de mise en œuvre envisagées.
« Je ne regarderais pas ces frais de gestion comme une taxe, c’est simplement fait pour compenser les coûts et ça devrait être payé par les plateformes, a-t-il déclaré. Nous parlons de deux euros par colis, payés par les plateformes et pour les services offerts par les entrepôts, ce serait plus modeste, à 50 cents, donc c’est vraiment juste pour compenser le travail des officiels des douanes ».
Une idée soutenue par la France
Le ministre de l’Économie, Eric Lombard, et la ministre chargée des Comptes publics, Amélie de Montchalin, avaient déjà annoncé, fin avril, leur intention de porter au niveau européen cette idée de frais de gestion appliqués aux colis chinois échappant aux droits de douane.
Ils évoquaient alors un volume de l’ordre de « 800 millions de petits articles » arrivant chaque année en France en provenance de plateformes comme Shein, Temu ou Aliexpress, et arguaient de la nécessité de mieux contrôler ces produits. « Quand les douaniers ouvrent aujourd’hui les colis, 94% des produits sont non conformes, dont 66% pour dangerosité », avait notamment déclaré Eric Lombard.
Les ministres français exprimaient alors la volonté de créer une coalition européenne pour arriver à la mise en œuvre, dès 2026, de frais de gestion forfaitaire, sans attendre le projet de réforme de l’Union douanière (qui prévoit la suppression de la franchise de 150 euros pour les droits de douane).
Maroš Šefčovič n’a pour l’instant précisé aucun calendrier.
Auteur : Alexandre Laurent
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