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Histoiredesinventions.com – Quand la science amène du plaisir: l’invention du floating widget de Guinness

Cet article est né d’une déception. Dans mon village, aucun bistrot ne propose de Guinness à la pression, l’une des très rares bières qu’il m’arrive de boire. À l’occasion d’une visite dans un centre commercial d’une ville voisine, j’ai eu envie d’acheter une canette de Guinness. Ne la trouvant pas, je me suis rabattu sur une bouteille. Quelle déception à l’ouverture : le pétillant remplaçait la mousse que je recherchais. Il m’a donc fallu comprendre pourquoi la bière en bouteille est différente de celle en canette.

Il n’a pas été simple pour moi d’écrire cet article : je ne connais pas grand-chose à la bière, lui préférant les whiskys costauds provenant des petites îles du nord de l’Écosse. Pour vous parler du floating widget, j’ai donc dû plonger dans un univers qui m’est largement inconnu, où il est question de gaz et de pistons.

Même un novice sait reconnaître une Guinness au premier coup d’œil (ou de langue, c’est selon). Comme toutes les bières, la Guinness est fabriquée par fermentation, un processus durant lequel les levures transforment les sucres du malt en alcool et en CO₂. Dans une bière classique, une partie de ce CO₂ reste dissoute, contribuant à son effet pétillant. Or, pour obtenir la texture crémeuse et la mousse persistante qui font la signature de la Guinness, le CO₂ seul ne suffit pas. C’est là qu’intervient l’azote : lors du service, un mélange de gaz, composé majoritairement d’azote avec un peu de dioxyde de carbone, est injecté pour créer cet effet caractéristique.

Dans une canette classique, le dioxyde de carbone reste enfermé et ne se libère qu’à l’ouverture. Mais l’azote naturel contenu dans la Guinness lors de sa fabrication ne suffit pas à recréer la texture idéale à domicile, il faut donc l’ajouter. L’idée peut sembler simple, mais sa mise au point a été complexe : le premier brevet date de 1969, et il a fallu attendre 20 ans pour que Guinness commercialise une solution efficace. En 1989, la marque dévoile le floating widget, une petite capsule en plastique creuse dotée d’un orifice.

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L’intérieur d’une cannette de Guiness avec son floating widget. Une image de Duk, disponible sur wikimedia commons.

Lors du remplissage de la canette, un peu d’azote est dissous dans la bière sous haute pression, et une petite quantité de liquide pénètre également dans le widget. Tant que la canette reste scellée, la pression maintient l’azote dissous. A l’ouverture, la pression chute brusquement, libérant l’azote emprisonné dans le widget. Ce phénomène crée un tourbillon de fines bulles qui se diffusent dans la bière, reproduisant ainsi l’effet d’un tirage au fût.

Le premier dispositif décrit dans le brevet UK 1,266,351 du 27 janvier 1969, déposé par Seward Harold Hildebrand et John Anthony Carey pour Guinness, ressemblait à une seringue qu’il fallait activer au moment de l’ouverture d’une bouteille de Guinness Draught. Ce système a été commercialisé en 1979 en Irlande, mais a toutefois été abandonné au profit du widget sphérique moderne, plus simple, plus fiable et plus efficace, tout en offrant un résultat similaire.

Grâce au floating widget, les amateurs de Guinness peuvent désormais savourer chez eux une bière presque identique à celle servie au pub.



Auteur : Grégoire Pomey

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Artia13

Bonjour ! Je m'appelle Cédric, auteur et éditeur basé à Arles. J'écris et publie des ouvrages sur la désinformation, la sécurité numérique et les enjeux sociétaux, mais aussi des romans d'aventure qui invitent à l'évasion et à la réflexion. Mon objectif : informer, captiver et éveiller les consciences à travers mes écrits.

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