Cyberéthique et libertés numériques


L’Europe précise les obligations des fournisseurs de modèles d’« IA à usage général »

La partie de l’AI Act sur l’ « IA à usage général » entre en vigueur le 2 aout prochain. En publiant ses lignes directrices sur le sujet, la Commission européenne répond aux critiques des entreprises contre l’insécurité réglementaire qu’amènerait le règlement européen sur l’IA, en donnant des interprétations assez larges de certains termes, comme « open-source ».

Ce vendredi, la Commission européenne a publié ses lignes directrices concernant les modèles d’IA générative qu’elle classe dans la catégorie de l’ « IA à usage général ». L’idée est de clarifier, pour les entreprises d’IA comme Google, OpenAI, Meta, Anthropic, ou Mistral, la partie du texte de l’AI Act qui doit rentrer en application début aout. Ces lignes directrices sont ainsi une explication de texte de l’AI Act adressée à ces entreprises.

Cette clarification accompagne le « code de bonne conduite » que la commission a publié un peu plus tôt. Comme nous l’expliquions, ce code est très peu contraignant. Mais si Mistral a joué le bon élève en le signant, Meta a publiquement fait savoir qu’il ne l’avaliserait pas.

Des définitions pour clarifier la loi

Dans ses lignes directrices, la Commission donne enfin une définition de ce qu’elle appelle « IA à usage général ». Car, comme elle l’avoue elle-même en creux, l’AI Act en livrait une définition assez vague. Ici, au lieu de la définir exclusivement par ses capacités à générer des contenus de différents types (textes, images, vidéos, sons…), elle donne une approche quantitative des ressources utilisées pour entrainer le modèle en question.

Ainsi, « un critère indicatif pour qu’un modèle soit considéré comme un modèle d’IA à usage général est que les ressources de calcul pour son entrainement soient supérieures à 1023 FLOP et qu’il puisse générer du langage (que ce soit sous forme de texte ou d’audio), du texte à l’image ou du texte à la vidéo ».

Les entreprises d’IA générative avaient apparemment besoin d’une clarification sur les termes de « fournisseur » d’ IA à usage général et de « mise sur le marché » d’une IA à usage général. La commission leur fournit donc des explications par l’exemple.

Ainsi, elle explique que :

  • « Si l’acteur A développe un modèle d’IA à usage général et le met sur le marché, l’acteur A est le fournisseur.
  • Si l’acteur A fait développer pour son compte par l’acteur B un modèle d’IA à usage général et que l’acteur A met ce modèle sur le marché, l’acteur A est le fournisseur.
  • Si l’acteur A développe un modèle d’IA à usage général et le télécharge dans un référentiel en ligne hébergé par l’acteur C, l’acteur A est le fournisseur.
  • Si un collaborateur ou un consortium fait développer un modèle d’IA à usage général par différentes personnes ou organisations et met le modèle sur le marché, c’est généralement le coordinateur du collaborateur ou du consortium qui est le fournisseur. Le collaborateur ou le consortium peut également être le fournisseur. Cette situation doit être évaluée au cas par cas ».

Concernant la mise sur le marché :

  • un modèle d’IA à usage général est mis à disposition pour la première fois sur le marché de l’Union par l’intermédiaire d’une bibliothèque de logiciels ou d’un progiciel ;
  • un modèle d’IA à usage général est mis à disposition pour la première fois sur le marché de l’Union par l’intermédiaire d’une API ;
  • un modèle d’IA à usage général est uploadé pour la première fois sur un catalogue, une plate-forme ou un référentiel public en vue d’un téléchargement direct sur le marché de l’Union ;
  • un modèle d’IA à usage général est mis à disposition pour la première fois sur le marché de l’Union sous la forme d’une copie physique ;
  • un modèle d’IA à usage général est mis à disposition pour la première fois sur le marché de l’Union par l’intermédiaire d’un service de cloud computing ;
  • un modèle d’IA à usage général est mis à disposition pour la première fois sur le marché de l’Union en étant copié sur l’infrastructure d’un client ;
  • un modèle d’IA à usage général est intégré dans un chatbot mis à disposition pour la première fois sur le marché de l’Union via une interface web ;
  • un modèle d’IA à usage général est intégré dans une application mobile mise à disposition pour la première fois sur le marché de l’Union via des magasins d’applications ;
  • un modèle d’IA à usage général est utilisé pour des processus internes qui sont essentiels pour fournir un produit ou un service à des tiers ou qui affectent les droits des personnes physiques dans l’Union ».

Une IA « open-source » de façon large pour la Commission

La commission explique aussi ce qu’elle considère comme un modèle sous licence open-source et libre. Ainsi, elle propose une version assez large de la définition d’un modèle open-source. Contrairement à certaines demandes, elle affirme que, pour elle, pour qu’il soit qualifié d’ « open-source », un modèle à usage général ne doit pas « nécessairement révéler des informations substantielles sur les données utilisées pour son entraînement ou pour sa modification, ni sur la manière dont le respect du copyright a été assuré ».

Cette définition est plus large que celle donnée par l’OSI. Pour qualifier l’IA d’ « open-source », l’institution internationale exige, elle, une description « complète » des données utilisées pour entrainer le modèle.

La commission affirme, par contre, que les licences qui imposeraient des usages non commerciaux, les limiteraient à la recherche ou qui interdiraient la distribution du modèle ne feront pas partie de ce qu’elle considère comme des licences de modèles « open-source ».. De même pour ceux qui imposeraient un nombre maximum d’utilisations gratuites ou l’utilisation d’une licence commerciale particulière pour des cas d’utilisation spécifique.

Enfin, la commission rappelle qu’elle considère que le code de bonne conduite sera un moyen simple pour juger de la conformité avec l’AI act, ce qui doit simplifier les démarches administratives des entreprises qui l’auront signé. Dans ses lignes directrices, la commission souligne qu’à partir du 2 aout 2026, elle pourra donner des amendes allant jusqu’à 15 millions d’euros ou 3% du chiffre d’affaires annuel mondial.

Auteur : Martin Clavey

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Artia13

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