Maladie de Parkinson : les limites des alternatives à l’expérimentation animale

L’expérimentation animale fait débat. La recherche scientifique est-elle prête à se passer des animaux ? Les alternatives sont-elles suffisantes ? Colin Deransart, Bertrand Favier, Sabrina Boulet et Véronique Coizet de l’Université Grenoble Alpes prennent l’exemple de la maladie de Parkinson. Voici une version courte de leur article publié sur notre site le 28 avril 2025
Régulièrement critiquée, l’expérimentation animale reste nécessaire pour améliorer nos connaissances sur certaines pathologies. Par exemple la maladie de parkinson, qui touche plus de 270 000 personnes en France. Son diagnostic est souvent posé trop tard pour envisager des traitements curatifs.
Notre équipe travaille à identifier des marqueurs précoces de la maladie. L’enjeu, à terme, est de pouvoir prendre en charge les patients avant que les dommages soient irréversibles. L’expérimentation animale permet alors de compléter les données obtenues chez l’humain.
En 1959, les biologistes William Russel et Rex Burch ont proposé la « règle des 3 R » pour encadrer l’éthique de l’expérimentation animale : remplacer, quand c’est possible, l’utilisation d’animaux par des modèles alternatifs, réduire le nombre d’animaux requis et enfin raffiner les expérimentations pour minimiser les contraintes imposées aux animaux (douleur, souffrance, angoisse…).
Dans nos recherches, nous recourons à trois modèles animaux distincts : deux sur le rat et un sur le macaque. Cela peut sembler contraire à la dernière règle, mais cela permet de recouper les données et d’augmenter leur transposabilité à l’humain. Le premier portait ainsi sur des rats traités par une neurotoxine ciblant les neurones producteurs de dopamine. Le second s’intéressait à la production d’une protéine délétère, afin d’étudier la nature progressive de la maladie. Dans le troisième une injection de neurotoxine permettait de reproduire l’évolution des phases cliniques de la maladie, avec une plus grande homologie avec l’humain.
Chaque modèle animal reproduit ainsi un stade précis de la maladie et en constitue bien sûr une simplification. Ceci a permis d’identifier six métabolites potentiellement liés au processus neurodégénératif. En les combinant, on obtient un biomarqueur métabolique composite. En le recherchant chez des patients récemment diagnostiqués mais pas encore traités, on remarque qu’il permet de les distinguer de patients sains. À la clé, la perspective de mieux suivre l’évolution de la maladie de façon moins contraignante que les méthodes d’imagerie médicale actuelle, et un espoir thérapeutique : la dérégulation de plusieurs de ces métabolites pourrait être partiellement corrigée par un médicament mimant les effets de la dopamine.
Au-delà de ces avancées, les détracteurs de l’expérimentation animale mettent souvent en avant la faible transposabilité des résultats de l’animal à l’homme pour justifier le recours exclusif aux modèles in vitro ou in silico (numériques). Or, il n’a pas été démontré que la transposabilité de ces tests soit meilleure en l’état actuel des techniques. Ils sont en réalité les premiers cribles de l’ensemble des tests préclinique, tandis que la contribution des animaux en fin de phase préclinique permet d’exclure 40 % de candidats médicaments, notamment sur la base de risques chez l’humain. Cela permet de garantir des soins de qualité.
Et cela avec un impact limité : on estime qu’au cours de sa vie, un Français moyen ne « consommera » que 2,6 animaux de laboratoire, à comparer aux 1298 animaux consommés pour se nourrir.
Cet article a été édité par le service Environnement de The Conversation à partir de la version longue écrite par Colin Deransart, Bertrand Favier, Sabrina Boulet et Véronique Coizet de l’Université Grenoble Alpes.
Colin Deransart a reçu des financements de la Ligue Française Contre les Epilepsies, des Laboratoires GlaxoSmithKline, de la Fondation Electricité de France, de l’ANR et d’un Programme Hospitalier de Recherche Clinique.
Bertrand Favier est membre de l’AFSTAL. Sa recherche actuelle est financée par l’ANR et la Société Française de Rhumatologie en plus de son employeur.
Boulet sabrina a reçu des financements de l’ANR, la Fondation de France, la fondation pour la Rechercher sur le Cerveau, la fondation France Parkinson.
Véronique Coizet a reçu des financements de l’ANR, la fondation France Parkinson, la Fondation de France. Elle est présidente du comité d’éthique de l’Institut des Neurosciences de Grenoble et membre du comité Santé et bien-être des animaux.
Auteur : Service Environnement, The Conversation France
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