Décryptage technologique

Notre Soleil deviendra un jour une naine blanche, mais qu’est-ce que c’est exactement ?
Vue d’artiste d’une naine blanche, accrétant des débris rocheux laissés par le système planétaire. NASA, ESA, and G. Bacon (STScI), CC BY

*Les naines blanches sont un type particulier d’étoiles. Elles sont le destin d’environ 95 % des étoiles de notre galaxie, le Soleil compris. Que savons-nous de ces astres ? *


Les naines blanches sont des étoiles de très faible luminosité (environ mille fois moins que le Soleil). Elles sont blanches car extrêmement chaudes (de l’ordre de 10 000 à 100 000 °C, à comparer aux 5 000 °C à la surface du Soleil). En effet, en physique, on associe chaque couleur à une température (liée à la longueur d’onde et la fréquence de la lumière correspondante) : le blanc est le plus chaud, le bleu est plus chaud que le rouge, et le noir est le plus froid.

On pourrait penser qu’un astre plus chaud sera plus lumineux, mais ce n’est pas le cas pour les naines blanches. Pour les étoiles « standards » (comme le Soleil), les réactions nucléaires au sein de l’étoile sont responsables de leur émission de lumière. En revanche, il n’y a pas de réactions nucléaires dans une naine blanche, ce qui fait que la seule lumière qu’elle émet provient de son énergie thermique (comme un fil à incandescence dans une ampoule).

Les naines blanches sont d’une masse comparable à la masse du Soleil (2×1030 kg), mais d’un rayon comparable à celui de la Terre (6 400 km, contre 700 000 km pour le Soleil). En conséquence, les naines blanches sont des astres extrêmement denses (les plus denses après les trous noirs et les étoiles à neutrons) : la masse volumique de la matière y est de l’ordre de la tonne par cm3 (à comparer à quelques grammes par cm3 pour des matériaux « standards » sur Terre).

À de telles densités, la matière se comporte d’une manière très différente de ce dont on a l’habitude, et des effets quantiques apparaissent à l’échelle macroscopique : on parle de « matière dégénérée ». La densité y est tellement élevée que les noyaux atomiques sont plus proches des autres noyaux que la distance entre le noyau et les électrons. Par conséquent, les électrons de deux atomes proches devraient se retrouver au même endroit (sur la même « orbitale atomique »). Ceci est interdit par un principe de mécanique quantique appelé le principe d’exclusion de Pauli : de fait, les électrons se repoussent pour ne pas être sur la même orbitale, ce qui engendre une pression vers l’extérieur appelée « pression de dégénérescence ».


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Naine blanche : l’avenir du Soleil

Dans environ 5 milliards d’années, lorsque le Soleil commencera à manquer d’hydrogène pour ses réactions de fusion nucléaire, il grandira jusqu’à englober au moins Mercure, Vénus, et peut-être même la Terre, formant ainsi une géante rouge. Ensuite, il subira différentes phases de contraction et d’expansion, associées à différentes réactions de fusion de l’hydrogène et de l’hélium le composant. Cependant, il ne sera pas assez chaud pour effectuer les réactions de fusion d’atomes plus lourds (notamment celle du carbone). Par conséquent, la pression (vers l’extérieur du Soleil) ne sera plus suffisante pour compenser la gravité (vers l’intérieur), ce qui conduira à l’effondrement gravitationnel du cœur du Soleil pour former une naine blanche. Les couches périphériques du Soleil formeront quant à elles une nébuleuse planétaire, un nuage de gaz chaud et dense expulsé vers le milieu interplanétaire. Ce gaz formera peut-être plus tard une autre étoile et d’autres planètes…

Vue d’artiste montrant une comète tombant vers une naine blanche
Vue d’artiste montrant une comète tombant vers une naine blanche.
NASA, ESA, and Z. Levy (STScI), CC BY

Il existe une masse maximale pour une naine blanche, qui s’appelle masse de Chandrasekhar, et qui vaut environ 1,4 fois la masse du Soleil. Au-delà, les forces de pression internes n’arrivent plus à compenser la gravité. Lorsqu’une naine blanche dépasse la masse de Chandrasekhar en accrétant de la matière, elle s’effondre sur elle-même, donnant alors naissance à une étoile à neutrons ou une supernova. Dans une étoile à neutrons, l’état de la matière est aussi dégénéré, encore plus dense que la naine blanche. Les protons et électrons de la matière composant la naine blanche ont fusionné pour former des neutrons. Une supernova est un objet différent : il s’agit de l’explosion d’une étoile. Ce phénomène est très bref (d’une durée inférieure à la seconde), mais reste visible pendant quelques mois. Les supernovæ sont extrêmement lumineuses, et certaines ont même pu être observées en plein jour.

Si elle ne dépasse pas la masse de Chandrasekhar, la durée de vie théorique d’une naine blanche est si élevée qu’on estime qu’aucune naine blanche dans l’univers n’est pour l’instant en fin de vie, compte tenu de l’âge de l’univers (environ 13,6 milliards d’années). En effet, les naines blanches émettent de la lumière à cause de leur température. Cette lumière est de l’énergie dissipée par la naine blanche, ce qui fait qu’elle perd en énergie au cours de sa vie, et donc elle se refroidit. Plusieurs hypothèses ont été avancées quant au devenir ultime d’une naine blanche, comme les naines noires, ayant une température si basse qu’elles n’émettent plus de lumière.

Comment observer des naines blanches ?

La première naine blanche a été détectée par Herschel (découvreur d’Uranus) en 1783, dans le système stellaire triple 40 Eridani. Ce système est composé de trois étoiles, mais seule la plus lumineuse, 40 Eridani A, a pu être observée directement à l’époque ; l’existence des deux autres, 40 Eridani B (la naine blanche en question) et C, a été déterminée par des calculs de mécanique céleste.

Du fait de leur faible luminosité et de leur petite taille, les naines blanches sont longtemps restées indétectables par nos télescopes. Ce n’est que depuis les progrès technologiques du début du XXe siècle qu’elles sont observables directement. En effet, 40 Eridani B a été identifiée en tant que naine blanche en 1914.

Aujourd’hui, le catalogue Gaia de l’ESA (Agence Spatiale Européenne) compte environ 100 000 naines blanches dans notre galaxie, sur plus d’un milliard de sources lumineuses identifiées.


_L’auteur aimerait remercier particulièrement Dr Stéphane Marchandon (École de biologie industrielle) pour des discussions intéressantes et des corrections apportées au présent article.


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The Conversation

Romain Codur ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

Auteur : Romain Codur, Professeur de Physique, Dynamique des fluides et Modélisation, École de Biologie Industrielle (EBI)

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Artia13

Bonjour ! Je m'appelle Cédric, auteur et éditeur basé à Arles. J'écris et publie des ouvrages sur la désinformation, la sécurité numérique et les enjeux sociétaux, mais aussi des romans d'aventure qui invitent à l'évasion et à la réflexion. Mon objectif : informer, captiver et éveiller les consciences à travers mes écrits.