Personne ne l’avait vu : un immense nuage proche du Système solaire était caché sur la voûte céleste !
Il contient des milliers de fois la masse du Soleil, s’étire sur 40 diamètres lunaires sur voûte céleste, mais il était resté invisible… jusqu’à aujourd’hui. Découvrez Eos !
La radioastronomie ne nous a pas seulement permis de découvrir les quasars, d’imager l’ombre de l’horizon des événements de trous noirs supermassifs ou encore de détecter le fond d’ondes gravitationnelles du cosmoscosmos observable. Elle nous a aussi permis de cartographier des distributions et des vitesses de nuagesnuages d’hydrogène dans la Voie lactée, avec l’étude de la fameuse raie à 21 cm de l’hydrogène atomique d’abord et ensuite, en détectant les nuages d’hydrogène moléculaire H2. Nous avons alors découvert les bras spiraux de la Voie lactée.
Toutefois, l’hydrogène moléculaire ne rayonne pas si facilement même s’il constitue l’essentiel des nuages qui le contiennent. En fait, on détecte et on caractérise la présence de cet hydrogène par le fait qu’il entre en collision avec des moléculesmolécules de monoxyde de carbonemonoxyde de carbone (CO), ces collisions excitant les niveaux d’énergieénergie moléculaire du CO qui se met ensuite à rayonner en se désexcitant dans une bande de longueur d’ondelongueur d’onde accessible aux radiotélescopesradiotélescopes.
Du CO justement, il y en a très peu dans le nuage moléculaire appelé « Eos » (d’après la déesse grecque de la mythologie, personnification de l’aubeaube) dont la découverte par une équipe internationale de scientifiques, dirigée par l’astrophysicienne Blakesley Burkhart, de l’Université Rutgers-New Brunswick, vient d’être annoncée dans un article publié dans Nature Astronomy dont une version en accès libre existe sur arXiv.
Ceci explique pourquoi, bien que situé à seulement 300 années-lumièreannées-lumière environ du Système solaireSystème solaire, il avait échappé jusqu’à maintenant à la sagacité des yeuxyeux de la Noosphère. Comme le montre la vidéo ci-dessous, il se trouve dans une structure appelée la Bulle locale avec notre Système solaire. Rappelons que la Bulle locale a probablement été formée par plusieurs supernovæ ayant créé une cavité contenant tout de même de la matièrematière chaude dans une enveloppe de gazgaz et de poussières du milieu interstellaire.
Cette vidéo illustre la position d’Eos, un nuage d’hydrogène moléculaire récemment découvert, composé à 99 % de H2, à la limite de la Bulle locale, une vaste cavité gazeuse qui englobe le Système solaire. Il s’agit du nuage moléculaire le plus proche de la Terre, situé à seulement 300 années-lumière. © Thomas Müller, Institut Max Planck d’astronomie, et Thavisha Dharmawardena, Université de New York.
Eos, une clé de la compréhension de la naissance des étoiles
Si Eos avait contenu plus de CO, il serait apparu plus tôt comme l’une des plus grandes structures visibles sur la voûte céleste en radioastronomie. Sa projection dans le ciel mesurerait en effet environ 40 luneslunes. Mais c’est grâce au rayonnement émis dans l’ultravioletultraviolet par les molécules de H2 qu’Eos a été débusqué en utilisant un instrument appelé Fims-Spear (acronyme de spectrographespectrographe d’imagerie fluorescente), observant dans ce domaine des ondes électromagnétiquesondes électromagnétiques à bord du satellite coréen STSAT-1.
Dans un communiqué de l’Université Rutgers, Burkhart précise qu’« il s’agit du tout premier nuage moléculaire découvert en recherchant directement l’émissionémission d’hydrogène moléculaire dans l’ultraviolet lointain. Les données ont montré que des molécules d’hydrogène incandescentes étaient détectées par fluorescence dans l’ultraviolet lointain. Ce nuage brille littéralement dans le noir ».
Ces mêmes données permettent de dire qu’Eos contient une massemasse d’environ 3 400 fois celle du SoleilSoleil, mais que son agitation implique qu’il devrait s’évaporer dans 6 millions d’années.
Blakesley Burkhart ajoute que « lorsque nous observons avec nos télescopestélescopes, nous observons des systèmes solaires entiers en train de se former, mais nous ne savons pas précisément comment cela se produit. Notre découverte d’Éos est passionnante, car nous pouvons désormais mesurer directement la formation et la dissociation des nuages moléculaires, et comment une galaxiegalaxie commence à transformer le gaz et la poussière interstellairespoussière interstellaires en étoilesétoiles et en planètes ».
Sa collègue Thavisha Dharmawardena, boursière HubbleHubble de la NasaNasa à l’Université de New York et coauteure principale de l’étude est, elle aussi, enthousiaste quand elle déclare que « l’utilisation de la technique d’émission de fluorescence dans l’ultraviolet lointain pourrait révolutionner notre compréhension du milieu interstellaire, en révélant des nuages cachés à travers la Galaxie et même jusqu’aux limites les plus éloignées de l’aube cosmique ».
Auteur : Laurent Sacco, Journaliste
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