Le scénario d’un récent film met est relatif à un homme faisant partie d’une mission spatiale, dont l’objectif est de coloniser une exoplanète. Or, ce dernier meurt plusieurs fois au cours du voyage et systématiquement, voit son esprit téléchargé dans un nouveau corps. Cette méthode pourrait-elle un jour devenir réalité ?
Trois grandes fonctions à reproduire artificiellement
En ce qui concerne les voyages spatiaux interstellaires dans le cadre de l’exploration spatiale, l’hibernation est une possibilité assez souvent évoquée. Toutefois, une autre solution théorique existe : le téléchargement de l’esprit dans d’autres corps. Le film américano-sud-coréen Mickey 17 (2025) détaille justement cette technique très particulière. Le personnage principal de cette production (Mickey) est un « remplaçable », c’est à dire un employé jetable au sein d’une expédition humaine de colonisation de l’espace. Un nouveau corps est généré à chaque décès, intégrant la plupart des souvenirs de l’intéressé.
A l’occasion d’un article publié le 8 avril 2025, le CNRS Journal a interrogé Gregor Thut, directeur de recherche au CNRS au sein du Centre de recherche cerveau et cognition (Cerco) de l’Université de Toulouse. Pour l’expert, le téléchargement de l’esprit d’une personne dans un autre corps doit initialement passer par la reproduction des circuits neuronaux d’au moins trois grandes fonctions importantes : la mémoire, la conscience et la sensation de ne faire qu’un avec son corps. En effet, ces fonctions sont cruciales pour recréer le sens de soi et l’identité de la personne.

Un défi énorme et non sans danger
Gregor Thut s’est notamment attardé sur la mémoire qui, à l’instar de toutes les autres capacités cognitives, trouve sa source dans plusieurs réseaux neuronaux étendus dans le cerveau. Cependant, il existe plusieurs mémoires, certaines à court terme (quelques secondes ou minutes) et d’autres à long terme (tout au long de la vie). Or, les mémoires à long terme seraient celles ayant une grande importance dans l’entreprise de recréer l’identité d’une personne. Citons par exemple la mémoire épisodique stockant les souvenirs personnels ou encore, la mémoire procédurale (ou motrice) renfermant les savoir-faire et autres automatismes acquis durant notre existence. Le fait est que ces mémoires impliquent chacune différents circuits de neurones et régions cérébrales.
Au niveau de la conscience, le spécialiste a évoqué une théorie particulière : l’espace de travail neuronal global. Celle-ci stipule que la conscience naît d’une connexion globale entre plusieurs aires du cerveau se trouvant à l’avant et à l’arrière de celui-ci. Or, il est ici question d’un système permettant à la personne d’être consciente d’elle-même et de son environnement notamment via les sens, puis les différentes facultés mentales. Gregor Thut a aussi évoqué la sensation de ne faire qu’un avec son corps, prenant sa source à la fois dans le système visuel, le système vestibulaire (oreille interne) et le système proprioceptif (muscles, articulations etc.).
Enfin, l’expert a affirmé ses doutes quant à la possibilité de télécharger son esprit dans un autre corps. En effet, les trois fonctions évoquées ci-avant représentent un énorme défi. Au niveau de la mémoire à long terme, il faudrait pouvoir prendre connaissance de la signature neuronale (et synaptique) de chacun des souvenirs et apprentissages qui s’y trouvent. De plus, certains risques pourraient apparaitre, comme l’intrusion dans les pensées des personnes ou encore, le clonage de leur identité.