Soldes, Prime Day : le grand n’importe quoi des fausses promotions
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Entre les soldes et les Amazon Prime Day, l’actualité se remplit vite de relais de promotions en tout genre, à grands coups de superlatifs pour attirer le chaland. Problème, comme le relève encore une fois l’UFC-Que Choisir, de nombreux revendeurs « abusent de la confiance des consommateurs en multipliant les fausses promotions ».
Depuis mai 2022, une directive européenne (directive 2019/2161 dite directive « omnibus », transposée en droit français fin 2021) encadre la définition du prix de référence (ou prix barré) qui sert à calculer les remises.
La nouvelle règle impose d’utiliser le prix le plus bas des 30 jours précédents. Comme nous l’avions expliqué début 2022, cette règle figurait déjà dans la réglementation depuis… 1977 (arrêté 77 – 105/P). Elle était reprise dans un arrêté de 2008, mais elle a sauté en 2015. Cdiscount, épinglé pour de nombreuses promotions litigieuses, avait contesté cette réglementation et la justice européenne lui avait donné raison en septembre 2015.
« 85 % des prix barrés induisent les consommateurs en erreur »
Depuis la mise en place de la loi omnibus, le principe des 30 jours a été sacralisé par la Cour de justice de l’Union européenne fin 2024. C’est la théorie. Dans la pratique, « 85 % des prix barrés induisent les consommateurs en erreur », affirme l’UFC-Que Choisir dans une nouvelle étude. Exemple récent : Shein a accepté de payer 40 millions d’euros d’amende pour régler divers différents avec les autorités françaises, notamment de fausses remises.
Pour établir son bilan, l’UFC-Que choisir a analysé un millier d’annonces avec un prix barré, provenant de six revendeurs en ligne (Amazon, ASOS, Cdiscount, Shein, Temu, Zalando) : « Il en ressort que seuls 15 % des prix barrés sont de réelles réductions c’est-à-dire calculées sur le prix le plus bas pratiqué dans les 30 derniers jours ».

Corolaire : « Dans 85 % des cas, les vendeurs ont encore et toujours recours à des prix dits « de comparaison », présentés sous divers intitulés tels que « Prix de vente conseillé », « À l’origine », « Ancien prix », « Prix moyen sur la marketplace » ou encore « Prix renseigné par le vendeur » ». De quoi embrouiller le client qui ne sait plus trop où donner de la tête, ni comment comparer sereinement.
Problème, « ces dénominations, aussi variées qu’obscures, sèment la confusion et n’éclairent pas du tout le consommateur », affirment nos confrères. Ce n’est pas la première fois que l’UFC-Que Choisir dénonce ces pratiques. Ils affirment d’ailleurs que « les fausses promotions persistent depuis trois ans ».
Le prix de « comparaison » compare tout et n’importe quoi
Le principal problème vient du fait que la notion de prix de « comparaison » et le calcul qui suit ne sont pas encadrés par la loi, « mais laissé à la discrétion du commerçant », affirment nos confrères. Résultat des courses : « plus le prix barré est opaque ou arbitraire, plus la prétendue réduction affichée est importante ».
Selon l’étude de l’UFC, la réduction moyenne réelle en se basant sur la réglementation – c’est-à-dire sur le prix le plus bas des 30 derniers jours – est de 11 %, contre 31 % avec les prix de « comparaison ». La différence est flagrante.
« Déterminée à mettre un terme à ces pratiques trompeuses, dont l’ampleur reste bien trop considérable, l’UFC-Que Choisir saisit la Commission européenne afin de l’alerter sur les dérives persistantes de certains professionnels ». Nos confrères demandent d’interdire purement et simplement « tout système de prix de référence autre que celui prévu » par la directive omnibus.

La valse des « prix » et des réductions associées
Un tour sur la page des prix de référence d’Amazon permet de se rendre compte des nombreuses approches utilisées par le revendeur : Prix conseillé ou PVC, Prix Ponctuel, Ancien Prix, Prix Neuf. Ces prix peuvent être mis en complément du Prix récent le plus bas sur les 30 derniers jours. On peut ainsi avoir 5 % de réduction, mais 30 % avec un PVC, pour un même produit.
Chez Cdiscount, c’est carrément une filiale qui s’occupe de la collecte des prix et des calculs de réduction : Peaksys (.pdf). Le revendeur utilise la notion de prix de comparaison, qui peut renvoyer vers le « Prix conseillé par la marque/le fabricant en xx/xxxx », le « Prix moyen constaté sur notre Marketplace », le « prix de comparaison renseigné par le vendeur de la Marketplace ».
Deux exemples tout chauds (dans la multitude d’autres pratiques du genre). Cdiscount propose un portable VivoBook 15 à 549,99 euros au lieu de 649,99 euros en « prix de comparaison », avec des étiquettes « Bon plan Les imbattables » et « Moins cher qu’Amazon ». Une bonne affaire ? Pas vraiment. Nous avons acheté cette machine il y a une semaine, pour 479,99 euros. Afficher le meilleur prix des 30 derniers jours ne serait pas franchement vendeur, mais bien plus honnête.


L’overdose de promotions
L’UFC-Que Choisir a publié son étude hier, pendant les Amazon Prime Day et les soldes. Un calendrier qui ne doit rien au hasard, tant cette période ressemble parfois à la foire à la saucisse. Les sites d’actualités relayent à grand coup de sélections et autres actualités les promotions à tout-va, reprenant parfois pour compte les remises affichées par les revendeurs. Et, encore, on ne parle même pas des communiqués, sous NDA, pour… des promotions.
Un exemple. Un site d’actualité propose une sélection des « meilleures offres à saisir maintenant » pour les Prime Day avec : « iPhone 16e à 592 € au lieu de 799 € ». Le smartphone est bien à 592 euros, avec un prix le plus bas des 30 derniers jours de 669 euros (- 12 %) et un prix conseillé de 719 euros (- 18 %), qui était aussi son prix au lancement. D’où viennent les 799 euros ? Mystère et boule de gomme. Cet exemple, il ne nous a pas fallu plus de 30 secondes pour le trouver.
Cette promotion n’est pas non plus folle puisqu’on trouve assez facilement l’iPhone 16e à moins de 600 euros. Rue du Commerce par exemple le propose à 594 euros avec un prix barré à 599 euros, soit une belle remise en rouge de «- 0 % ». Avec 2 minutes de plus, on trouve un iPhone 16e à 589 euros chez RED by SFR avec « 80 euros remboursés après achat », sous forme d’un « avoir sur votre ou vos prochaines factures ». Intéressant si vous souhaitez changer d’opérateur. Bref, c’est pas si simple d’afficher le « bon prix ».

La raison est simple : l’affiliation. Vous allez chez le revendeur en suivant un lien d’un site d’actualité ou de bons plans, celui-ci touche alors une commission sur les ventes. Il faut donc envoyer un maximum de personnes sur un maximum de sites pour récupérer des pourcents sur les ventes, pour au final des sommes qui peuvent se compter facilement en dizaines de milliers d’euros.
Chez Next, on connait bien le sujet, mais nous avons décidé depuis déjà plusieurs années de ne plus proposer de bons plans ni d’affiliation sur aucun de nos liens. Une promesse renforcée depuis le rachat par moji, avec la fin de toute forme de publicité sur notre site, pour l’ensemble de nos lecteurs.
Auteur : Sébastien Gavois
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