
C’est étonnant quand on y pense, mais cela ne fait qu’un siècle environ que l’on a commencé vraiment à connaître la structure de notre Galaxie grâce à l’astronomeastronome états-unien Harlow Shapley. Pour atteindre son but, il avait entrepris, à partir de 1914, d’utiliser les positions et les mouvements des amas globulaires en orbite autour de la Voie lactée afin de déterminer sa taille et la position qu’occupait le Soleil. Il arriva finalement au résultat escompté en 1918.
Depuis, notre savoir sur l’UniversUnivers-île que nous habitons, tel que le philosophe Emmanuel Kant le dénommait, n’a fait que progresser, notamment avec la cartographie de ses nuagesnuages de gazgaz via la fameuse raie à 21 cm de l’hydrogène et aujourd’hui grâce aux spectaculaires relevés astrométriques des positions et vitessesvitesses des étoilesétoiles de la Voie lactéeVoie lactée, fournis par la mission Gaia.
D’Aristote au James-Webb
Nous savons désormais que le Système solaireSystème solaire se trouve dans une galaxie spiralegalaxie spirale. Bien que Shapley en doutait encore au début des années 1920 avant d’être convaincu par les découvertes de son collègue et compatriote Edwin Hubble, les nébuleusesnébuleuses montrant des objets en forme de galaxies spirales sont bien extérieures à la Voie lactée à laquelle elles ressemblent, en étant parfois plus grandes, comme c’est le cas de la galaxie d’Andromèdegalaxie d’Andromède.
C’est l’aboutissement d’une quête millénaire de la noosphère s’interrogeant sur la nature et la structure de notre Galaxie. Il y a plus de 2 000 ans, AristoteAristote pensait qu’il s’agissait d’une sorte de phénomène météorologique. Mais Démocrite et Anaxagore le concevaient déjà comme un rassemblement d’étoiles trop peu lumineuses pour être distinguées à l’œilœil nu. C’est finalement Galilée qui va véritablement faire démarrer l’étude scientifique de notre Galaxie en pointant vers la Voie lactée sa lunette, confirmant par ses observations les conceptions de Démocrite et Anaxagore.
Aujourd’hui, les héritiers de la lunette de GaliléeGalilée sont en fait des télescopestélescopes et le plus étonnant en date n’est rien de moins que le télescope spatial James-Webbtélescope spatial James-Webb (JWST).
Nous avons découvert plusieurs siècles après Galilée qu’il existe en fait plusieurs types de galaxies et nous avons entrepris d’expliquer comment elles se forment et évoluent depuis un peu plus de 13 milliards d’années, quelques centaines de millions d’années tout au plus après le Big BangBig Bang. Le James-Webb est l’outil pour sonder des stratesstrates de lumièrelumière ancienne de l’Univers observable à la recherche des premières populations de galaxies afin de tester nos théories cosmogoniques à leur sujet.
Une grande galaxie spirale trop mature pour le modèle cosmologique standard ?
Les calculs, analytiques et surtout numériquesnumériques menés dans le cadre du modèle cosmologique standardmodèle cosmologique standard avec matièrematière et énergie noireénergie noire, font des prédictions quant à ce que le JWST devrait voir.
Or, la découverte révélée aujourd’hui d’une galaxie spirale – baptisée Zhúlóng – surprend les cosmologistes.
Comme l’explique un article publié dans Astronomy & Astrophysics, cette galaxie spirale découverte dans le cadre de l’étude Panoramic par une équipe internationale co-dirigée par Christina Williams, astronome au NOIRLab (National Optical-Infrared Astronomy Research Laboratory) et par Williams et Pascal Oesch de l’Université de Genève (Unige), est observée telle qu’elle était il y a 12,5 milliards d’années.
« Nous avons baptisé cette galaxie Zhúlóng, qui signifie »dragon torche » dans la mythologie chinoise. Dans le mythe, Zhúlóng est un puissant dragon solaire rouge qui crée le jour et la nuit en ouvrant et en fermant les yeux, symbolisant la lumière et le temps cosmique. Zhúlóng se distingue par sa ressemblance avec la Voie lactée, tant par sa forme que par sa taille et sa massemasse stellaire », explique Mengyuan Xiao, chercheuse postdoctorale au Département d’astronomie de la Faculté des sciences de l’Unige et auteure principale de l’article publié.
C’est la galaxie spirale la plus lointaine connue à ce jour et elle apparaît étonnamment plus mature et massive qu’elle ne devrait l’être d’après les prédictions des théoriciens.
Le communiqué NOIRLab explique en effet que « les grandes galaxies spirales de conception grandiose, comme notre Voie lactée, sont fréquentes dans l’Univers proche. Mais elles se sont avérées difficiles à trouver dans l’Univers primordial, ce qui concordeconcorde avec les prévisions selon lesquelles les grands disques dotés de bras spiraux devraient mettre plusieurs milliards d’années à se former ».
Curieusement, « Zhúlóng présente une structure étonnamment mature, unique parmi les galaxies lointaines, généralement agglomérées et irrégulières. Elle ressemble aux galaxies de l’Univers proche et possède une masse et une taille similaires à celles de la Voie lactée. Sa structure présente un bulbe compact en son centre, composé d’étoiles âgées, entouré d’un grand disque d’étoiles plus jeunes qui se concentrent dans des bras spiraux ».
On pensait que les bras spiraux mettaient plusieurs milliards d’années à se former, mais Zhúlóng montre que cela pourrait aussi se produire en seulement un milliard d’années. Toutefois, cette galaxie reste une rareté, ce qui pourrait s’expliquer par le fait que les galaxies étant beaucoup plus proches il y a 13 milliards d’années, des interactions gravitationnelles avec collisions et fusionsfusions devaient être plus fréquentes, faisant des structures spirales des phénomènes transitoires dont les duréesdurées de vie ne deviendront plus importantes qu’après plusieurs milliards d’années d’expansion de l’espace.
Auteur : Laurent Sacco, Journaliste
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