En observant la Nébuleuse d’Orion avec le James Webb Telescope, une équipe d’astronomes a détecté du cation méthyle (CH3+). Il s’agit d’une molécule qui joue un rôle important dans la création de la chimie complexe du carbone nécessaire à la vie telle que nous la connaissons.
Une « pierre angulaire » détectée dans l’espace
Imaginez les atomes comme des briques Lego : chaque petit bloc de construction se combine pour créer un bloc plus complexe, des molécules aux enzymes en passant par l’ADN. Pour la première fois, des astronomes ont détecté une molécule jouant un rôle crucial dans ce processus : la molécule cation méthyle (CH3+).
Le cation méthyle est un ion positif composé d’un atome de carbone (C) et de trois atomes d’hydrogène (H). Il s’agit également d’un radical libre, ce qui signifie qu’il contient un électron non apparié. En raison de cette caractéristique, cette molécule est hautement réactive et peut être impliquée dans diverses réactions chimiques. Elle est en effet capable de se lier avec un grand nombre de molécules organiques pour en former de plus complexes.
En ce sens, le cation méthyle est depuis longtemps considéré comme la « pierre angulaire » de la chimie interstellaire. Cependant, jusqu’à présent, aucun télescope n’avait été en mesure de la détecter dans l’espace. C’est désormais chose faite grâce au James Webb Telescope. Cet observatoire peut en effet détecter les signatures de molécules spécifiques, également appelées raies d’émission de molécules, avec une grande précision.
« Nous avons détecté un signal mystérieux dès le début de nos observations de cette nébuleuse avec le spectromètre MIRI. Néanmoins, il nous a fallu quelques semaines pour comprendre qu’il s’agissait du fameux cation méthyle que tout le monde recherche depuis les années 1970« , précise Olivier Berné, astrophysicien de l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie de Toulouse, au magazine Science & Avenir. Cette molécule tant recherchée a été isolée dans un disque protoplanétaire appelé d203-506. Il s’agit d’un Système solaire naissant situé dans la nébuleuse d’Orion, à environ 1 300 années-lumière de la Terre.

Que nous apprend cette étude ?
À ces premiers stades de la formation des planètes, le disque protoplanétaire entourant les étoiles est étouffé par les rayons ultraviolets (UV) à haute énergie qui en émanent. Pour de nombreuses grosses molécules complexes à base de carbone, ces UV sont une condamnation à mort. Cependant, cette recherche montre qu’ils pourraient en fait être la clé de la formation du cation méthyle en premier lieu. Ce processus pourrait alors fournir juste assez d’énergie pour démarrer la chimie organique, construire des molécules de carbone plus complexes et semer les graines du vivant dans un système en formation.
« Cette détection valide non seulement l’incroyable sensibilité du JWT, mais confirme également l’importance centrale postulée du CH3+ dans la chimie interstellaire« , note Marie-Aline Martin-Drumel, astronome à l’Université Paris-Saclay, dans un communiqué.
Ce n’est pas la première fois que le James Webb Telescope détecte des molécules aussi importantes dans l’espace. Des observations ont en effet révélé les molécules organiques complexes les plus anciennes jamais découvertes, situées à 12,3 milliards d’années-lumière de la Terre. En janvier dernier, l’observatoire avait aussi permis la détection des .